lundi 10 juin 2013

Charles Drelincourt – une petite biographie



Charles Drelincourt naît le 10 juillet 1595 à Sedan (Champagne-Ardenne). Son père, Pierre Drelincourt, réfugié de Caen, pour cause de religion, est secrétaire de Henri-Robert de La Marck (1540-1574), prince de Sedan, duc de Bouillon, puis greffier au Conseil Souverain de la ville ; sa mère, Anne Buyrette, est la dernière fille de Nicole Buyrette, un avocat au Parlement de Paris ayant embrassé la Réforme, et sœur du pasteur-martyr Thomas Buyrette, tué lors de la Saint-Barthélemy (1572) avec son beau-frère Jean Molé, comme le raconte Charles dans l’épître dédicatoire à ses Neuf Dialogues contre les missionnaires (1665).

Charles étudie les humanités et la théologie à Sedan, puis il est envoyé à Saumur (Pays de la Loire) pour y étudier la philosophie à l’académie, sous la direction du médecin et philosophe écossais Marc Duncan (1581-1640).

Il est consacré au saint ministère en juin 1618. Bien qu’il reçoive plusieurs propositions, il accepte l’appel pour être pasteur d’une Eglise qui devait se créer à Langres, car il s’attend à « une grande moisson » dans cette ville où habite un grand nombre de « temporiseurs », c’est-à-dire de personnes sur le point de se déclarer comme protestants. Or le Conseil du roi refuse d’émettre l’arrêt permettant la création d’une Eglise à Langres. Cette situation attriste profondément le jeune pasteur qui tombe gravement malade.

Tout espoir d’un établissement à Langres s’étant envolé, Charles accepte l’appel de l’Eglise de Paris à Charenton, pour succéder à Pierre Du Moulin (1568-1658) qui se voit obligé de se réfugier à Sedan. Il y prêche pour la première fois le 15 mars 1620.

En 1625 il épouse Marguerite Bolduc (1607-1688), la fille unique d’un riche marchand parisien. Elle lui donne seize enfants, à savoir treize fils et trois filles ; seuls six d’entre eux survivent à leur père.

Charles Drelincourt est pasteur de l’Eglise de Paris pendant presque cinquante ans.

Pierre Bayle dit de son ministère :
« La bénédiction de Dieu qui se répandit sur son mariage par une fécondité non commune, ne se répandit pas moins sur son ministère. Ses prédications étaient fort édifiantes ; il était incomparable dans la consolation des malades ; et il s’employait avec un grand fruit aux affaires de son église, et même à celles des autres troupeaux, sur lesquelles il ne manquait jamais d’être consulté quand elles étaient importantes. On ne saurait dignement représenter les services qu’il a rendus à l’église par la fécondité de sa plume, soit que l’on regarde ses livres de dévotion, soit que l’on regarde ses livres de controverse. Il y a tant d’onction dans les premiers, l’esprit et les expressions de l’Ecriture y règnent de telle sorte, que les bonnes âmes y ont trouvé et y trouvent encore tous les jours une pâture merveilleuse. Ce qu’il a écrit contre l’église romaine a fortifié les protestants plus que l’on ne saurait dire; car, avec les armes qu’il leur a fournies, ceux même qui n’avaient aucune étude tenaient tête aux moines et aux curés, et prêtaient hardiment le collet aux missionnaires. Ses écrits l’ont fait regarder comme le fléau des controversistes catholiques, et néanmoins il était aimé dans l’autre parti. Les grands seigneurs de la religion lui témoignèrent toujours une considération très particulière. … »
C’est un auteur très prolixe ; outre trois tomes de sermons, il publie un grand nombre d’ouvrages polémiques ainsi qu’un Catéchisme (1642) et les bestsellers Le triomphe de l’Eglise sous la croix, ou la gloire des martyres (1629), qui a été réédité maintes fois et traduit en allemand, et surtout Les consolations des l’âme fidèle contre les frayeurs de la mort, avec les dispositions et préparations pour bien mourir (1651), qui a connu des dizaines de rééditions et qui a eu une large diffusion aussi dans sa traduction anglaise. Dans le même genre, on peut citer Les visites charitables, ou les Consolations chrétiennes pour toutes sortes de personnes affligées (1667-1669, en cinq volumes). 

Le 3 novembre 1669, six jours après avoir prêché pour la dernière fois, Charles Drelincourt meurt à Paris.

Parmi ses seize enfants, il y a plusieurs pasteurs et médecins de renom. On peut citer :
  • Laurent (1626-1680) l’aîné, pasteur comme son père, d’abord à La Rochelle, puis à Niort, jusqu’à sa mort ; il a laissé quelques sermons remarquables, mais surtout une collection de Sonnets chrétiens très célèbre.
  • Henri (1631-1676 ?) qui abandonne une carrière d’avocat pour devenir pasteur à Gien et à Fontainebleau ;
  • Charles (1633-1697) est un célèbre médecin et un anatomiste de renom. Après des études à Saumur, il est reçu docteur en médecine en 1654 et devient, en 1655, le médecin particulier de Turenne et, en 1659, le médecin ordinaire du roi. En 1668, il part pour Leyde, où il devient professeur de médecine à l’université. Pierre Bayle chante ses louanges, non seulement comme médecin mais aussi comme théologien et comme « honnête homme ».
  • Antoine (1641-1730), médecin en Suisse, notamment au service des seigneurs de Berne ;
  • Benjamin-Nicolas (1643- ?), mort pendant ses études de théologie à Genève ;
  • Pierre (1644-1722), qui s’installe en Angleterre comme prêtre de la Church of Ireland et accède à la dignité de doyen d’Armagh (Irlande du Nord) ;
  • Amélie-Charlotte, qui est emprisonnée à la Bastille avec son mari, Daniel de Malnoé, et leur fils aîné Charles en 1685 ; libérés en échange de leur abjuration, Daniel et son fils se réfugient à l’étranger, mais Amélie-Charlotte reste. Elle semble avoir entraînée sa mère, Marguerite Bolduc, qui abjure à son tour en 1686, deux années avant sa mort. La conversion d’Amélie-Charlotte étant jugée au-dessus de tout soupçon, elle réussit à se faire attribuer les biens des Drelincourt fugitifs en 1688.
Nous ne savons pas grand-chose sur ses autres enfants, à savoir Catherine (1626-1655 ?), Jean (1630-?), Daniel-Amaury (1634- ?), Henri-Théophile (1636-1638 ?), Gaspard (1637-?), Marguerite (1639- ?), Marie (1650-1652) – et deux autres dont nous ignorons même le nom –, si ce n’est qu’ils ne semblent pas avoir survécu à leur père.

Source principale : Pierre Bayle, Dictionnaire historique et critique, tome second, 1740, p. 309s


Egalement publié sur mon site consacré à la grande prédication française (ici).

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