Eugène Bersier naît le 5 février 1831 à Morges, dans le canton de Vaud (Suisse). Son père, Jacques Bersier, d’origine française, est alors intendant d’une grande famille anglaise à Morges ; sa mère, née Louise Coindet (? – 1856), est à moitié anglaise et d’origine huguenote. Eugène est le plus jeune d’une fratrie de quatre enfants : Emma (18??-1859), Auguste (qui émigrera en Amérique et deviendra journaliste), William (qui meurt à l’âge de douze ans, brûlé vif dans un laboratoire de chimie) et Eugène.
En 1838, la mère, séparée de son mari,
et ses enfants s’installent à Genève ; ils y vivent dans une assez
grande pauvreté : Louise fait vivre la famille en donnant des cours
d’anglais et de musique. Eugène entre au collège de la ville. Son frère
et sa sœur ayant quitté le domicile familial, Eugène y vit finalement
seul avec sa mère.
En 1845, celle-ci part pour la Livonie (un territoire alors russe, correspondant aux états baltes de nos jours), où elle remplace Emma en tant que préceptrice. Eugène reste seul à Genève ; il continue ses études secondaires tout en gagnant sa vie comme répétiteur, d’abord dans la pension de M. Janin-Chevalier, ensuite chez M. Gibert. Il est confirmé par le pasteur Demôle et envisage de devenir pasteur, mais par la suite, il se rapproche davantage du socialisme. Ayant terminé ses études secondaires en 1847 et commencé des études de belles lettres, il décide subitement de partir pour l’Amérique.
En 1845, celle-ci part pour la Livonie (un territoire alors russe, correspondant aux états baltes de nos jours), où elle remplace Emma en tant que préceptrice. Eugène reste seul à Genève ; il continue ses études secondaires tout en gagnant sa vie comme répétiteur, d’abord dans la pension de M. Janin-Chevalier, ensuite chez M. Gibert. Il est confirmé par le pasteur Demôle et envisage de devenir pasteur, mais par la suite, il se rapproche davantage du socialisme. Ayant terminé ses études secondaires en 1847 et commencé des études de belles lettres, il décide subitement de partir pour l’Amérique.
Après un court séjour à Paris, où il est témoin des événements de juin 1848,
il traverse l’Atlantique en voilier. Il reste d’abord à New York, où il
passe l’hiver dans une grande pauvreté. Il caresse l’idée de partir en
Chine, mais une lettre de sa mère le détourne de ce projet. On lui
propose une place d’enseignant dans un pensionnat de New Rochelle, une
ville de la banlieue nord de New York. Il y vit une sorte de conversion à
la lecture d’un sermon de Vinet. Il étudie beaucoup, entre autres
l’hébreu biblique. En été 1850, il repart en Europe, avec la ferme intention de faire des études de théologie.
En octobre de la même année, il s’inscrit à l’école de théologie de l’Oratoire de Genève. Il passe ses examens en janvier 1854
et soutient une thèse sur « La méthode de l’apologétique ». Il monte
ensuite à Paris, avec l’intention d’y poursuivre ses études. Il se
trouve rapidement intégré à la « chapelle Taitbout » de l’Eglise libre,
héritière du Réveil de 1830. On lui demande de remplacer ponctuellement
Edmond de Pressensé (1824-1891). Il collabore également à la toute
nouvelle Revue Chrétienne et se voit souvent invité chez son rédacteur
en chef, le médecin et naturaliste Henri Hollard (1801-1866), dont une
sœur avait épousé Victor de Pressensé (1796-1865). Hollard a trois
enfants : Marie (1831-19??), Roger (1838-1902, pasteur à Bordeaux et à
Paris) et la poétesse Henriette (1840-1875). Eugène se fiance avec Marie
au mois de mai 1854.
Peu après, Eugène est nommé – sans avoir été consulté
auparavant – pasteur du Comité de la Société Evangélique de France au
faubourg Saint-Antoine à Paris. Il part néanmoins, dès le mois de
juillet, pour un séjour d’études en Allemagne, d’abord à Halle, où
enseigne le théologien August Tholuck (1799-1876), puis à Göttingen, où
Eugène suit l’enseignement d’Isaak Dorner (1809-1884). Mais son séjour
allemand est raccourci, car Henri Hollard est nommé professeur de
zoologie à Poitiers et souhaite voir le mariage de sa fille concrétisé
avant son départ de Paris. Le mariage a donc lieu le 10 février 1855.
Eugène travaille ensuite comme pasteur au faubourg Saint-Antoine. C’est
là que naît sa fille aînée Mathilde (1855-1945). Le 5 septembre, il est
consacré au saint ministère dans la chapelle Taitbout. 1855 est aussi
l’année de sa naturalisation en France.
A partir de 1856, Bersier effectue des
voyages de collecte en faveur de différentes œuvres protestantes,
notamment en Angleterre et en Hollande, mais aussi dans le Midi de la
France. Cette activité lui donne aussi l’occasion d’une rencontre avec
Victor Hugo à Guernesey.
En 1858, son fils aîné Henri naît à
Poitiers. Un peu plus tard, Bersier et sa femme quittent l’Eglise du
faubourg Saint-Antoine, à la demande de Victor de Pressensé, qui a
besoin d’aide dans la gestion de diverses œuvres, dont la Société des
traités religieux. La proximité de Bersier avec Edmond de Pressensé lui
donne également accès à certains cercles d’intellectuels parisiens.
En 1959 son troisième enfant, Emma
(1859-1913), vient au monde. Vers cette période, Eugène Bersier commence
à s’intéresser à la question de la liturgie du culte.
En août 1860, on lui demande de
remplacer le pasteur Georges Fisch (1814-1881) de la chapelle Taitbout,
qui effectue un séjour d’un an aux Etats-Unis. Au retour de M. Fisch, en
1861, l’Eglise décide de maintenir Eugène dans sa
fonction. Sa fille Henriette (1861- ?) naît au mois de novembre de la
même année. Peu à peu, le jeune pasteur prend conscience de sa vocation
comme prédicateur. Il continue cependant à diriger la Société des
traités et à collaborer aux œuvres de la Société évangélique.
En mars 1865, son cinquième et dernier
enfant, Paul (1865-1945), vient au monde. En automne de la même année,
Bersier passe ses vacances en Allemagne, dans la Hesse, pour compléter
ses études trop brusquement interrompues. Mais un mois après son
arrivée, il est rappelé d’urgence à Paris, où le choléra a fait des
victimes à la chapelle de Taitbout.
La santé des enfants pousse le pasteur à déménager les
siens du Boulevard des Batignolles au Boulevard Pereire (près de
Neuilly) en 1866. Ce déménagement finira par avoir des
conséquences inattendues. Bersier organise un service religieux du soir
dans une salle d’école à Neuilly. Il est assisté par ses collègues de la
chapelle Taitbout. Quand la salle devient insuffisante, en 1868, on déménage dans un local de l’Avenue de la Grande Armée.
Bersier devient un conférencier apprécié ; en 1869, par exemple, on l’invite, à donner une série de conférences à Genève et à Strasbourg.
En 1870, il caresse le rêve d’acheter
un terrain pour construire une église plus grande, mais ce projet est
anéanti par le siège de Paris. Les armées prussiennes avançant, Bersier
envoie sa femme et ses enfants en Normandie. Un peu plus tard, la
famille trouve refuge sur l’île de Jersey. Lui-même, comme la plupart
des pasteurs de la capitale, reste à Paris. Il prendra la direction des
brancardiers du Comité Evangélique de secours des blessés et monte même,
à la demande de Sir Richard Wallace (1818-1890), une ambulance au nom
de l’Angleterre. Quand Paris capitule, après un siège long et éprouvant,
le 28 janvier 1871, Bersier en est profondément
affligé. Après de courtes retrouvailles avec sa famille, il retourne à
Paris où se prépare la catastrophe suivante : la guerre civile. Des
curés sont arrêtés en grand nombre et les insurgés molestent les
diaconesses de Reuilly, mais les pasteurs ne sont pas inquiétés. L’accès
aux ambulances de la Commune leur est cependant interdit. Marie
Bersier, qui trouve son mari particulièrement découragé, le rejoint
finalement à Paris, malgré son ordre contraire. Ils s’installent dans
l’appartement d’Edmond de Pressensé, rue de Clichy, leur maison du
boulevard Péreire ayant été réquisitionnée par la Commune. Privé de
toute activité, Bersier écrit une chronique de la Commune dans le Journal de Genève.
Après la chute de la Commune, la vie reprend doucement
dans la capitale. Les Bersier retrouvent leur maison en piteux état.
L’épouse et les enfants d’Eugène prolongent leur séjour à Jersey ; le
pasteur est épaulé par sa belle-sœur Henriette.
En juin 1872, le Synode général
officiel de l’Eglise réformée se tient à Paris. Bersier y participe en
tant que délégué des Eglises libres et se fait remarquer par son
assiduité.
En 1873, Bersier est cependant très
actif au Synode des Eglises indépendantes à Saint Jean du Gard, où il
est élu président. Le Conseil de la Chapelle de l’Etoile décide la
construction d’une église plus grande. Le terrain choisi en 1870 est
acheté et un architecte suédois est agréé. Le pasteur s’active dans la
récolte de fonds pour la nouvelle église.
L’année 1874 marque un tournant pour
Bersier. L’année commence mal, car le pasteur tombe gravement malade, au
point qu’on craint pour sa vie : une fièvre typhoïde le terrasse
pendant plusieurs semaines. En octobre, il repart en Angleterre pour
collecter des fonds pour la nouvelle Eglise. A son retour, il prend une
grande décision qui semble avoir mûri pendant longtemps : il démissionne
de la chapelle Taitbout et fait les démarches pour se rattacher, ainsi
que l’Eglise de l’Etoile, à l’Eglise établie. Ce rattachement est
ratifié par le Consistoire de Paris en 1877.
Les raisons précises de ce changement radical sont quelque peu obscures et sans doute multiples. A priori la démarche n’est pas due à des considérations financières, car l’Eglise de l’Etoile se finance par des dons et Bersier ne devient que pasteur auxiliaire dans l’Eglise réformée. Marie Bersier évoque néanmoins le désir « d’assurer l’avenir de l’œuvre de l’Etoile ». Bersier explique dans la brochure polémique « Mes actes et mes principes » qu’il s’agit pour lui de ne pas abandonner les multitudes protestantes par un repli dans l’isolation des Eglises libres. Son retour à l’Eglise réformée serait aussi « une affirmation de l’unité même visible de cette Eglise ». On constate d’ailleurs chez Bersier un grand attachement à l’Eglise anglicane (à laquelle appartenait sa grand-mère maternelle) et sa liturgie, c’est-à-dire à un monde ecclésiastique plus proche de l’Eglise réformée que des Eglises libres. Outre la liturgie, sa passion pour l’histoire des huguenots rapproche Bersier de l’Eglise établie. Il est donc difficile de trancher, mais on peut penser que Bersier pensait pouvoir rayonner davantage en faisant partie de l’Eglise nationale. Peut-être croyait-il avoir plus de chances de promouvoir sa réforme de la liturgie de l’intérieur de l’Eglise réformée.
Lors de l’inauguration de la nouvelle Eglise, le 29 novembre 1874, on inaugure aussi la nouvelle liturgie.
En septembre 1875, Bersier perd sa
belle-sœur bien-aimée Henriette Hollard. Le pasteur publiera un recueil
de poésies de la jeune femme. Au mois de septembre de la même année,
l’Eglise de l’Etoile fait appel à un deuxième pasteur, Edmond Stapfer
(1844-1908) ; son installation a lieu en août 1876. Il sera remplacé par
Jules Vinard (1848-1920) en 1888.
A partir de juillet 1878, Bersier collabore régulièrement à la Mission populaire du Révérend écossais Robert McAll (1821-1893).
Parmi les projets marquant les dernières années du ministère d’Eugène Bersier on peut citer :
- La création d’une école professionnelle de jeunes filles ;
- La réalisation d’un monument en souvenir de l’amiral Gaspard II de Coligny (1519-1572) – ce monument, situé au chevet de l’église de l’Oratoire à Paris, a été inauguré en juin 1889 ;
- Le projet d’une liturgie à l’usage des Eglises Réformées, qui n’a finalement pas été présenté au Synode national de 1890.
Bersier meurt de manière inattendue, le 18 novembre 1889, foudroyé par une crise cardiaque. Il semblerait que son dernier mot est : « Et l’Eglise ! »
Outre ses cinq enfants, dont aucun ne semble avoir
repris le flambeau pastoral, Bersier a laissé un grand nombre d’écrits,
dont une multitude d’articles de journaux. Comme œuvres majeures on peut
citer :
- ses Sermons (sept volumes)
- Histoire du Synode général de l’Eglise Réformée de France, 2 vol., 1872
- Liturgie à l’usage des Eglises Réformées, 1874, 1876, 1881
- Coligny avant les guerres de religion : études sur le XVIe siècle, 1884
Parmi ses descendants, nous avons identifié quelques
personnes connues, dont le peintre et graveur Jean-Eugène Bersier
(1895-1978), le directeur de l’Ecole des Mines Edmond Friedel
(1895-1972) ou encore le physicien Jacques Friedel (1921-2014).
Sources :
- Eugène Bersier, « Mes actes et mes principes. Réponse aux attaques de M. J.F. Astié », Paris, 1877, 93 p.
- Marie Bersier, Recueil de souvenirs de la vie d’Eugène Bersier, Fischbacher, Paris, 1911, 459 p. Ce n’est pas à proprement parler un texte historique – l’ouvrage déborde de bon sentiments, on frôle parfois l’hagiographie –, mais force est de constater que c’est presque la seule source d’information sur la vie personnelle du pasteur.
- André Encrevé et Daniel Robert, « A l’occasion du centenaire de l’Eglise de l’Etoile (1974-1975) ; Eugène Bersier (1831-1889) », Bulletin de la Société du Protestantisme Français, juillet-août-septembre 1976, p. 211-228
- André Encrevé, entrée « Bersier » in Mayeur-Hilaire, Dictionnaire du monde religieux. 5. Les protestants, 1993, p. 689
- Stuart Ludbrook, « Eugène Bersier (1831-1889) », La Revue Réformée, n° 198, mars 1998, p. 59. Ceux qui s’intéressent à la liturgie de Bersier devraient consulter la thèse de Ludbrook sur « La liturgie de Bersier et le culte réformé en France : ‘ritualisme’ et renouveau liturgique. » (591 pages tout de même !)
- Informations généalogiques glanées sur quelques sites Internet, et notamment les arbres généalogiques de Jean Friedel sur Geneanet.
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Aussi publié sur mon site consacré à la prédication française (ici).
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